La sérénité apparente de la scène politique congolaise a été brusquement troublée par l’initiative conjointe de deux députés nationaux déterminés à lever le voile sur une affaire potentiellement explosive.
Fontaine Mangala, élu de la ville de Kisangani, le lieu même où doit sortir de terre une nouvelle prison centrale, et Willy Mishiki, représentant de la circonscription de Walikale, ont déposé avec une solennité palpable, le mercredi 14 mai 2025, deux questions orales assorties d’un débat imminent à l’Assemblée nationale.
Leur cible ? Nul autre que le ministre de la Justice, Constant Mutamba, dont la gestion du projet de construction de cette infrastructure pénitentiaire est désormais placée sous un feu nourri de questions et de suspicions.
Au cœur de leur démarche inquisitrice réside une énigme financière d’envergure : où sont passés, ou n’ont jamais été décaissés, les colossaux 39 millions de dollars américains prétendument alloués à ce projet censé moderniser les capacités d’incarcération dans une région qui en a cruellement besoin ?
Cette interrogation lancinante, portée par la légitimité de leur mandat parlementaire, menace de déstabiliser davantage un paysage politique déjà complexe et de raviver les sempiternelles accusations de mauvaise gestion et de potentielle corruption dans les sphères étatiques.
Fort de la puissance des articles 100 et 138 de la Constitution congolaise, qui consacrent le droit de contrôle du Parlement sur l’action gouvernementale, Fontaine Mangala a élevé la voix pour dénoncer publiquement ce qu’il perçoit comme des “irrégularités” flagrantes entachant la procédure de construction de la prison de Kisangani.
L’élu de la capitale de la Tshopo, dont la population attend avec impatience la réalisation de cette infrastructure promise, ne mâche pas ses mots face à ce qu’il considère comme des manquements graves aux règles de bonne gouvernance et de transparence dans la gestion des fonds publics.
Son insistance sur la nécessité de clarifier le processus d’attribution des marchés, les études de faisabilité réalisées et les mécanismes de contrôle mis en place témoigne d’une volonté de s’assurer que ce projet vital pour sa communauté ne soit pas entravé par des pratiques douteuses.
Dans le même sillage, Willy Mishiki a apporté son propre éclairage, non moins alarmant, en faisant état de “contradictions” troublantes avec un communiqué émanant du ministère des Finances.
Cette divergence d’informations officielles, loin de rassurer, a au contraire alimenté chez le député de Walikale de “soupçons” sérieux quant à un éventuel détournement des fonds alloués à la construction de la prison.
L’ombre de la malversation plane désormais au-dessus de ce projet, et l’insistance des deux élus à obtenir des réponses claires et documentées de la part du ministre de la Justice se justifie pleinement par la nécessité impérieuse de dissiper ces zones d’ombre et de rétablir la confiance du public dans la gestion des affaires de l’État.
La détermination conjointe de Fontaine Mangala et de Willy Mishiki à obtenir des explications du ministre Constant Mutamba marque un moment potentiellement important dans le contrôle parlementaire de l’action gouvernementale en RDC.
Ces deux élus, issus de régions géographiquement distinctes mais unis par leur souci de la transparence et de la bonne gestion des deniers publics, exigent des réponses précises et étayées sur le circuit financier de ce projet d’envergure.
Ils veulent savoir si les 39 millions de dollars ont réellement été décaissés, à qui ils ont été versés, et comment ils ont été utilisés jusqu’à présent.
Leur démarche courageuse se heurte cependant à un écueil non négligeable : la question de la redevabilité des membres du gouvernement face aux interpellations parlementaires.
L’interpellation de ces deux élus du peuple soulève avec une pertinence déconcertante le précédent fâcheux de ministres tels qu’Alexis Gisaro et Augustin Kibasa qui auraient, selon les informations relayées, refusé de répondre à des convocations de l’Assemblée nationale, tout en conservant impunément leurs portefeuilles ministériels.
Cette culture de l’impunité, si elle venait à se confirmer dans le cas de Constant Mutamba, porterait un coup sévère à l’autorité du Parlement et alimenterait le sentiment d’une justice à deux vitesses.
L’opinion publique congolaise, de plus en plus sensible aux questions de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption, observera avec une attention particulière la réaction du ministre de la Justice face à cette interpellation.
Sa présence et la clarté de ses réponses seront perçues comme un test de la volonté du gouvernement à se soumettre au contrôle démocratique et à rendre des comptes sur l’utilisation des fonds publics, tandis que son silence ou des réponses évasives ne feraient qu’alimenter les soupçons et renforcer le sentiment d’une impunité persistante au sommet de l’État.