Au cœur de la diplomatie congolaise, une figure discrète mais déterminante opère un travail de fond pour redéfinir les contours d’une relation bilatérale importante. Ndolamb Ngokwey, Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la RDC auprès du Royaume-Uni, vient de marquer deux années à la tête de cette mission.
Dans un entretien exclusif qu’il aurait pu accorder à Diaspora Positive Magazine, (selon l’esprit de l’audience accordée à cet organe de presse panafricain le 18 juin 2025 à Londres), lequel, on ne sait comment, a atterri dans une rédaction à Kinshasa , le diplomate a accepté de lever le voile sur les dynamiques, les défis et les avancées d’une période qu’il qualifie modestement de “jalons dans un processus”. Loin des bilans triomphants, l’Ambassadeur Ngokwey privilégie la diplomatie des “petits pas”, un travail patient et persévérant qui, même en un court laps de temps, a déjà engendré des motifs de satisfaction tangibles et des réussites dignes de fierté.
Sa priorité est claire : “Ma priorité aujourd’hui, c’est de mener à bien la mission que m’a confiée le Président de la République, celle d’impulser un nouvel élan dans la coopération entre le Royaume-Uni et la RDC, dans l’intérêt de nos deux peuples”, déclare-t-il, soulignant la vision stratégique qui guide chacune de ses actions pour renforcer les liens entre Kinshasa et Londres.
DEUX ANS DE DIPLOMATIE INTENSE – DIALOGUE DE HAUT NIVEAU ET POINTS FORTS D’UNE MISSION STRATÉGIQUE
En deux années seulement, l’Ambassadeur Ndolamb Ngokwey a su poser des fondations solides pour un renouveau de la coopération entre la RDC et le Royaume-Uni, malgré le caractère intrinsèquement lent et exigeant du travail diplomatique.
Parmi les succès majeurs qu’il met en avant, l’établissement d’un dialogue politique de haut niveau est sans conteste un jalon essentiel.
Ce dialogue s’étend non seulement au gouvernement britannique, mais englobe également l’opposition et le parlement, garantissant une compréhension plus large et plus nuancée des enjeux congolais au sein de l’échiquier politique britannique.
Cette approche inclusive permet de bâtir des relations plus résilientes et transversales, essentielles pour un partenariat durable. Au-delà des échanges formels, la collaboration approfondie avec les institutions financières britanniques a ouvert des perspectives économiques significatives, positionnant la RDC comme un partenaire d’investissement potentiel plus attractif.
Le travail méticuleux mené avec la diaspora congolaise constitue un autre pilier de cette diplomatie, reconnaissant le rôle crucial de cette communauté dans le développement du pays et son influence au Royaume-Uni.
Les points forts de sa mission sont multiples et reflètent une stratégie multidimensionnelle.
Un effort considérable a été déployé pour éclairer le gouvernement et le parlement britanniques sur la situation complexe à l’Est de la RDC.
Ce plaidoyer soutenu a porté ses fruits, aboutissant à des déclarations publiques qui laissent entrevoir un fléchissement notable de la position britannique, un signe d’une meilleure compréhension et d’un soutien potentiellement accru.
L’organisation, en avril 2024, de la plus grande mission commerciale et d’investissement britannique jamais menée en RDC marque un tournant économique majeur, symbolisant un intérêt concret et grandissant des investisseurs britanniques pour les opportunités congolaises.
Par ailleurs, la consolidation des liens avec la diaspora est une priorité constante, qu’il s’agisse de ses activités d’intégration au Royaume-Uni ou de ses contributions au développement en RDC.
La promotion active de la culture congolaise, le développement de la coopération scientifique et culturelle, ainsi que l’amélioration continue des services consulaires complètent ce tableau, démontrant une approche holistique de la diplomatie qui va au-delà des seuls aspects politiques et économiques.
Malgré ces avancées, l’Ambassadeur concède des difficultés en matière de communication, la “question congolaise” restant trop peu présente dans la presse britannique, et la visibilité des actions de l’ambassade constituant un “chantier important” sur lequel ses équipes travaillent activement.
Et aussi soit-il, les limiers de “Diaspora Positive Magazine” se portent caution, et à Londres, et à Kinshasa, pour accompagner la mission de l’Ambassadeur Ngokwey.
LE RÉSEAU ET LE TERROIR – TISSER DES LIENS AVEC LES AUTORITÉS LOCALES ET VALORISER LA DIASPORA
L’établissement de relations solides avec les autorités britanniques est un art que l’Ambassadeur Ndolamb Ngokwey maîtrise avec une finesse particulière, capitalisant sur des liens aussi bien formels qu’informels.
La fluidité des échanges avec les responsables du “Foreign Office”, les membres du parlement – notamment via le dynamique groupe parlementaire multipartite sur la RDC – et l’Envoyé spécial pour le commerce, est le fruit d’une stratégie proactive.
L’Ambassadeur révèle une anecdote éclairante : il avait eu l’opportunité de rencontrer plusieurs responsables de l’actuel gouvernement britannique alors qu’ils étaient encore dans l’opposition, dont cinq “ministres de l’ombre” qui sont aujourd’hui devenus des ministres de plein exercice. Cette anticipation stratégique a grandement facilité l’établissement d’un dialogue constructif et une compréhension mutuelle des dossiers dès sa prise de fonction.
La diaspora congolaise constitue, quant à elle, une priorité absolue pour l’ambassade, reconnue comme une ressource inestimable. L’effort de la connaître et de recenser ses membres a permis de révéler des talents incroyables dans une multitude de domaines : ingénieurs, médecins, écrivains, et bien d’autres.
La vitalité de cette diaspora se manifeste par l’existence de nombreuses associations professionnelles, de structures communautaires telles que l’association de “Matanga”, et de milliers d’ONG dirigées par des Congolais.
La présence ecclésiastique est également frappante, avec la Pastorale Congolaise du Royaume-Uni regroupant plus de trois cent quatre-vingt-sept Églises et plus de quatre cent cinquante Pasteurs de réveil, sans oublier une grande aumônerie catholique, une forte présence kimbanguiste, des Congolais dans les Églises protestantes et la communauté musulmane. Cette richesse de la diaspora va même jusqu’à la présence de Congolais au sein du protocole du Parlement britannique ou de la sécurité du “Foreign Office”, témoignant de leur intégration et de leur influence.
L’ambassade a initié le programme “l’homme ou la femme du mois” pour mettre en lumière ces réussites et les soutenir, encourageant même les investisseurs britanniques à associer la diaspora congolaise à leurs projets en RDC. L’Ambassadeur insiste sur le fait que la culture est un levier diplomatique essentiel, un puissant vecteur de “Soft Power”, sur lequel il mise énormément, compte tenu de sa formation et de sa passion personnelles.
Des opérateurs culturels comme Awilo Longomba, Claudia Bakisa, Kasai Masai, ou l’Association des écrivains congolais du Royaume-Uni sont activement associés aux événements de l’ambassade, en attendant le grand projet de l’ouverture d’un Centre Culturel Congolais à Londres, une priorité gouvernementale. L’Ambassadeur exprime une fierté particulière pour cette diaspora qui a réussi malgré l’absence de soutien, soulignant ainsi sa résilience et sa valeur intrinsèque.
UNE VOCATION AU SERVICE DE LA NATION – LES QUATRE POINTS CARDINAUX DE LA DIPLOMATIE CONGOLAISE
Au-delà des accomplissements spécifiques, c’est une véritable vocation au service de la nation qui anime l’Ambassadeur Ndolamb Ngokwey.
Fort de trente ans de carrière aux Nations Unies et conscient de son âge, il rejette le terme “ambition” au profit de celui de “vocation”, soulignant une approche altruiste et désintéressée de sa mission.
Sa priorité est claire et non négociable : “mener à bien la mission que m’a confiée le Président de la République, Son Excellence Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, pour impulser un nouvel élan dans la coopération entre le Royaume-Uni et la RDC, dans l’intérêt de nos deux peuples”.
Cette déclaration incarne la feuille de route de son action diplomatique, axée sur les bénéfices mutuels.
La diplomatie de la RDC au Royaume-Uni repose sur ce qu’il appelle les “quatre points cardinaux” : – la diplomatie politique, visant à consolider les liens intergouvernementaux et interparlementaires ; – la diplomatie économique, centrée sur l’attraction des investissements et le renforcement des échanges commerciaux ; – la diplomatie culturelle et scientifique, pour promouvoir le rayonnement de la RDC et encourager les partenariats académiques ; et enfin, le travail avec la diaspora, reconnaissant son rôle crucial comme pont entre les deux nations.
Tous ces piliers sont activement soutenus par une diplomatie publique robuste et une communication proactive, visant à améliorer la visibilité et la perception de la RDC.
La collaboration avec les autres ambassades, notamment celles des pays de la SADC, de la Communauté d’Afrique de l’Est et d’Afrique Centrale, ainsi qu’avec les ambassades des membres du Conseil de sécurité, est également un axe fort de son plaidoyer stratégique.
Malgré un emploi du temps “théoriquement” libre – l’Ambassadeur avoue envoyer des messages professionnels à 3 heures du matin –, il s’efforce de préserver des moments personnels pour la famille, la musique, la lecture et l’écriture, avec deux livres “prêts à 90 %” qui attendent désespérément un peu de ce “temps libre” pour être finalisés.
C’est le témoignage d’un engagement total, d’une vie dédiée au service de son pays.
*John-Paul MAJEPA et David MUTEBA KADIMA*